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Les symptômes de la Sclérose en plaques (SEP)

Les symptômes de la Sclérose en plaques (SEP)

Nous n'envisagerons pas en détail les signes cliniques de la SEP, ce livre n'étant pas un traité de médecine. Il est difficile cependant de ne pas aborder la question, car le public est aujourd'hui informé par la presse, la télévision ou internet, et il n'est pas rare qu'un malade consulte pour s'entendre confirmer un diagnostic qu'il avait lui-même soupçonné.

Symptômes de début

Les premiers signes de la maladie se présentent sous forme de symptômes très divers, survenant seuls ou associés, de façon brutale ou insidieuse, par poussées successives ou de manière lentement progressive.

Les troubles moteurs sont les plus fréquents, particulièrement dans les formes à début tardif. On note une perte de force variable allant d'une simple fatigabilité pour exécuter certains mouvements à une perte totale de la motilité. Elle peut concerner n'importe quel membre mais atteint plus souvent les jambes. Un interrogatoire attentif révèle souvent que les troubles sensitifs sont fréquents mais que les patients n'y prêtent pas attention au début. Il peut s'agir de fourmillements, d'impression de pesanteur, de serrement, de brûlure, d'engourdissement ou d'insensibilité. Ces troubles peuvent être localisés dans un territoire correspondant à un nerf ou une racine nerveuse précise (sciatique par exemple) et orienter le diagnostic vers une névrite. Les troubles cérébelleux (résultant d'une lésion du cervelet) sont décrits comme une perte d'équilibre, une marche instable, comparables à ceux d'une intoxication alcoolique aiguë. Il n'est pas exceptionnel que des patients SEP soient ainsi accusés d'alcoolisme, d'autant plus que certains malades éprouvent des vertiges, et doivent se tenir aux murs pour se déplacer. On peut également observer un manque de précision dans les mouvements, un tremblement lorsqu'on veut saisir un objet, ou une parole mal articulée.

Les troubles visuels et en particulier une baisse brutale de vision uni- ou bilatérale (névrite optique) associée à une douleur derrière l'orbite à la mobilisation des yeux, précèdent souvent le début de la maladie de plusieurs années. La névrite optique est une atteinte du nerf de la vision lui-même, elle ne résulte donc pas d'une lésion cérébrale. Elle peut exister en tant que maladie isolée et ne pas évoluer vers une SEP. Dans ce cas, certains la considèrent cependant comme une SEP, mais caractérisée par un seul symptôme (forme monosymptomatique). Plus de 80% des patients ayant présenté une névrite optique développeront d'autres symptômes de SEP endéans les dix ans si l'IRM montre déjà des lésions cérébrales au moment du diagnostic de névrite optique. Dans le cas contraire, le taux
de conversion est de cinquante pour cent. Une vision double (diplopie) peut être un des premiers symptômes (15 % des cas) et s'observe surtout dans une période de fatigue. Le fait de percevoir deux objets en partie superposés au lieu d'un seul, résulte de la paralysie d'un nerf commandant la motilité des yeux, ce n'est donc pas une atteinte du nerf optique.

Enfin, un symptôme qui précède souvent le début des autres signes cliniques est la fatigue. Elle se présente en général sous forme de brusques "coups de pompe", d'une sensation d'épuisement, de chape de plomb. Cet état disparait généralement après un bref repos.

Exceptionnellement la SEP peut débuter par une altération globale des fonctions cognitives et des troubles de la personnalité sans aucun autre signe neurologique et très souvent ces patients jeunes sont considérés comme hystériques. L'IRM met en évidence des lésions situées dans la substance blanche dont on pense qu'elles interrompent les connexions entre le tronc cérébral et le cortex dans les régions frontales et pariétales. Leur topographie particulière expliquerait cette forme inhabituelle de début. Ces lésions associées à des anomalies du LCR permettent de considérer ces patients comme étant certainement atteints de SEP.

Symptômes ultérieurs

Au cours de l'évolution de la maladie, les symptômes de début réapparaissent et sont de plus en plus marqués. Les problèmes moteurs s'associent à de la raideur (spasticité), des secousses rythmiques des jambes ou des pieds (clonus), des mouvements brusques,
involontaires, entraînant la flexion ou l'extension d'un membre (spasmes), etc... Les troubles de sensibilité sont le plus souvent de type douloureux. A l'exception des névralgies du trijumeau, il s'agit rarement de véritables douleurs, mais plutôt de sensations variées, très désagréables, que le patient interprète comme une douleur. Leur durée et le fait qu'elles ne cèdent pas aux antalgiques classiques entraînent parfois une véritable souffrance sur le plan psychologique. Les troubles cérébelleux rendent la marche difficile sinon même impossible à cause de troubles d'équilibre, malgré la conservation d'une force normale dans les jambes. Les tremblements cérébelleux qui ne se manifestaient au début que lorsque le patient voulait prendre un objet, s'observent même au repos et dans les cas graves le
corps est perpétuellement en mouvement, les malades étant alors incapables de s'alimenter.

L'atteinte de la partie du SNC qui réunit le cerveau et la moelle (tronc cérébral) provoque des troubles localisés au niveau de la tête : mouvements saccadés des yeux (nystagmus), parole mal articulée, explosive (dysarthrie), manque de synchronisation des mouvements oculaires (diplopie), névralgies du trijumeau, paralysie faciale, troubles de déglutition, et même troubles respiratoires dans les cas graves.

Après quelques années d'évolution, les patients qui présentent des plaques au niveau de la moelle épinière ont des difficultés pour uriner (rétention) ou au contraire perdent les urines (incontinence). En dehors d'une tendance à la constipation, les problèmes intestinaux sont moins fréquents.

Symptômes particuliers

Névrite optique

La névrite optique est une perte de la vision centrale avec conservation de la vision périphérique, ce qui se traduit pour le patient par une tache noire cachant l'objet qu'il fixe. Elle peut également se traduire par l'impression de regarder au travers d'une vitre sale. Elle atteint le plus souvent un seul oeil mais est parfois bilatérale et survient brusquement ou de façon rapidement progressive. Elle est fréquemment associée à une douleur lors des mouvements oculaires. La récupération se fait spontanément en quelques semaines. Elle peut être totale ou partielle. Elle constitue le premier signe de la maladie chez un quart environ des patients. Dans la moitié des cas, elle peut rester isolée et ne jamais être suivie d'autres signes neurologiques. L'administration de corticoïdes permet une récupération plus rapide, mais à long terme les séquelles sont les mêmes chez les malades traités ou non traités. A noter que les injections intraveineuses de hautes doses pendant quelques jours s'avèrent plus efficaces que la prise du médicament sous forme de comprimés à faible dose pendant plusieurs semaines et, chose intéressante, que ce traitement semble retarder l'apparition ultérieure des autres signes neurologiques et donc du diagnostic de SEP.

Ophtalmoplégie internucléaire

Ce nom barbare a été donné à un syndrome neurologique caractérisé par une paralysie particulière du regard suite à une plaque située entre deux noyaux qui commandent la motilité oculaire. Cette paralysie s'observe lorsque le patient regarde sur le côté, aussi bien à droite qu'à gauche, mais n'existe pas dans le regard de face. Ceci traduit l'existence d'une lésion située dans une région précise du système nerveux central (le tronc cérébral qui relie le cerveau à la moelle). L'observation d'une ophtalmoplégie internucléaire a une grande valeur diagnostique en SEP car très peu d'autres pathologies provoquent de tels symptômes.

Signe de Lhermitte

Lhermitte, un neurologue français, a décrit un phénomène particulier et fréquent dans la SEP puisqu'il s'observe chez près d'un tiers des malades. A l'occasion d'un mouvement de la nuque, d'un déplacement du haut du dos, ou lors d'une marche sur un sol inégal, le patient éprouve une brusque décharge électrique qui descend le long de la colonne ainsi que dans les bras, les jambes ou les deux à la fois. Ce signe s'observe également dans d'autres affections de la moelle cervicale mais si rarement qu'il faut toujours penser en premier lieu à la possibilité d'une SEP.

Myélite transverse

La "myélite transverse" est une atteinte inflammatoire de la moelle qui réalise le même tableau clinique que si on sectionnait la moelle. Le plus souvent situé dans la région dorsale, on observe une perte totale de la sensibilité et de la motricité des membres inférieurs ainsi qu'une paralysie des intestins et de la vessie. Le plus souvent la section est incomplète et c'est sous cette forme qu'elle peut être le premier signe d'une SEP. Environ 15 % des personnes ayant fait une myélite transverse feront plus tard une SEP.

Syndrome de la main inutile

Certains malades présentent une perte du sens de position et de la discrimination au niveau d'une main si bien qu'ils ne peuvent plus s'en servir correctement. Ils sont incapables de reconnaître les pièces de monnaie dans une poche ou de chercher un objet dans un sac. Par contre la force musculaire est normale. Ce signe est transitoire, ne durant que quelques mois, mais il peut réapparaître.

Symptômes paroxystiques

Une des particularités des symptômes cliniques dans la SEP est qu'ils peuvent n'être que de très brève durée, disparaissant en quelques heures. Autrefois ces symptômes étaient fréquemment étiquetés d'hystérie. Il s'agit le plus souvent de perte de sensibilité, de difficultés de parole, de troubles d'équilibre, de vision double, de surdité, de fatigue, de démangeaisons, etc...

La douleur

La moitié des malades se plaignent de douleurs. Dans 50 % des cas elles sont en relation directe avec la maladie, chez un tiers des patients il s'agit de douleurs tendinomusculaires et dans quelques cas (5 %) de douleurs d'origine psychologique. Les études cliniques s'accordent pour dire que les patients qui se plaignent de douleurs ont tendance à être déprimés et stressés. La question reste posée de savoir si c'est un terrain psychologique plus fragile qui prédispose à éprouver davantage de phénomènes douloureux, ou si ce sont les douleurs qui ont un impact sur le moral. Quoiqu'il en soit, il est certain que les douleurs, surtout chroniques, peuvent constituer pour certains patients un véritable handicap social. Les douleurs en rapport avec la SEP peuvent être chroniques, ou survenir sous
forme de crises d'intensité et de durée variables. Les douleurs chroniques s'observent chez la moitié des patients. Il n'existe pas de corrélation évidente avec le handicap. Elles sont plus fréquentes chez les femmes et augmentent avec l'âge. Elles concernent le plus souvent les extrémités et sont caractérisées par une impression permanente de brûlure, tolérable et d'intensité modérée. Elles sont en général accentuées par la chaleur et plus marquées la nuit.

Les douleurs dans le bas du dos sont également fréquentes. Elles irradient parfois dans les cuisses, mais rarement en-dessous des genoux. Elles sont aggravées par la station debout ou la position assise prolongées. Elles résultent très souvent d'une décalcification de la colonne et sont améliorées par le repos au lit, un lombostat ou la prise de calcium.
Les douleurs survenant sous forme de crises sont le plus souvent des névralgies du trijumeau, ou des spasmes douloureux. Les névralgies dites du "trijumeau" (parce que situées dans le territoire d'un nerf dont les trois branches innervent la face) sont fréquentes chez les personnes âgées. Par contre, lorsqu'elles surviennent chez une personne jeune, il faut évoquer la possibilité d'une SEP. On les appelle également "tic douloureux de la face" parce que la douleur est très violente et survient sous forme de décharges électriques de très courte durée, en salves. Elles peuvent être provoquées par la parole, le fait d'avaler ou par l'attouchement d'une petite zone de la face. Elles se situent parmi les névralgies les plus douloureuses et il arrivait autrefois que certains malades se suicident.

Aujourd'hui nous disposons de médicaments efficaces et en cas d'échec on peut recourir à une intervention chirurgicale mineure. Alors qu'elle est presque toujours unilatérale chez les personnes âgées, dans la SEP il n'est pas rare qu'elle frappe alternativement les deux côtés. Les spasmes douloureux atteignent plusieurs muscles d'un membre, durent de quelques secondes à quelques minutes et sont particulièrement pénibles. Ces phénomènes surviennent de façon brusque, plusieurs fois par jour pendant quelques semaines puis disparaissent. Il existe en général une contracture musculaire importante simultanée. Très spectaculaires, ils impressionnent le malade mais il faut savoir qu'en général ils ne réapparaissent plus par la suite.

La spasticité 

La spasticité recouvre un certain nombre de symptômes dont les plus importants sont la raideur, les spasmes et le clonus. Alors que la raideur et les spasmes peuvent s'observer au niveau des quatre membres, le clonus concerne presque toujours les chevilles. Lorsque le patient se met debout, il "danse" à cause d'une succession rapide et régulière de mouvements de flexion et d'extension des pieds. Ce phénomène peut perturber considérablement la marche et constituer un danger pour la conduite d'une voiture, en gênant le freinage ou le débrayage.

A un certain stade de la maladie, la spasticité est fréquente puisqu'elle s'observe chez 90 % des patients. Elle est différente de celle résultant d'une lésion vasculaire cérébrale ou d'un traumatisme médullaire. Sa principale caractéristique est de varier dans le temps, en fonction de l'évolution spontanée de la maladie, mais aussi sous l'influence d'autres facteurs tels que le stress, la température, une rétention vésicale, des escarres, etc... Son traitement est difficile car les médicaments qui agissent sur elle, entraînent souvent une perte de force. Or, dans certains cas, le malade utilise sa spasticité, et en particulier sa raideur, comme "béquille". Réduire la spasticité dans ce cas est davantage un inconvénient qu'un bénéfice. On oublie trop souvent que la spasticité étant influencée par des facteurs extérieurs, un traitement préventif et efficace consiste à éviter les rétentions vésicales, les escarres douloureuses, etc...

La fatigue

La fatigue est un symptôme auquel on attache peu d'attention mais qui est cependant une des caractéristiques principales de la maladie. Elle est fréquente puisque 8 % seulement des malades ne s'en plaignent pas. Chez 70 % des patients elle constitue un des symptômes les plus gênants et s'observe surtout en cas d'exposition à de fortes chaleurs. Lorsqu'elle survient, elle aggrave fréquemment (80 %) les autres symptômes. Quand on interroge soigneusement les malades, on constate que la moitié d'entre eux ont éprouvé de grandes fatigues bien avant de présenter les premiers signes de la SEP. Elle dure en général quelques heures, mais dans certains cas, elles peuvent affecter le patient pendant toute la journée. 40 % des malades en souffrent quotidiennement. Il n'y a pas de relation évidente avec la forme de la maladie, mais elle s'observe plus souvent dans les formes chroniques progressives. Il faut noter que dans les formes bénignes, elle est fréquemment le symptôme le plus gênant, même en l'absence de tout autre signe neurologique. Elle
constitue donc une forme particulière de handicap et influence beaucoup les difficultés physiques, psychologiques et sociales des patients.

Les mécanismes neurophysiologiques responsables de ce symptôme si particulier de la SEP ne sont pas connus avec précision. On sait que lorsque le SNC lance un ordre pour effectuer un mouvement par exemple, il produit une certaine quantité d'énergie qui va se propager le long des nerfs jusqu'aux muscles responsables du mouvement. La nature est prudente et, pour compenser toute perte d'énergie pouvant survenir en cours de route et assumer un effort imprévu, la quantité initiale est largement supérieure à celle nécessaire en fin de parcours pour effectuer le mouvement. En physiologie on a donné à ce phénomène le nom de "facteur de réserve". Une hypothèse plausible est que si la gaine de myéline d'un nerf est endommagée à plusieurs endroits, une quantité importante d'énergie est perdue. Dans ce cas le facteur de réserve peut être suffisant pour effectuer le mouvement, mais tout effort sera ressenti comme une fatigue parce que la réserve aura été épuisée par le mouvement lui-même.

Troubles associés

Troubles urinaires

Trois quarts des malades présentent des troubles urinaires. Cette grande fréquence s'explique par le fait que la fonction vésicale est commandée par trois centres nerveux distants les uns des autres : un premier dans les lobes antérieurs du cerveau, un second à la jonction de la moelle et du cerveau et le troisième dans la partie la plus basse de la moelle. Ces trois centres sont interconnectés par de longues voies nerveuses qui sont vulnérables et fréquemment interrompues par des plaques.

Le trouble le plus fréquent est l'impériosité, c'est-à-dire un besoin urgent d'uriner, assez souvent associé à de l'incontinence, surtout nocturne (énurésis). Un grand nombre de malades se plaignent également d'un besoin fréquent d'uriner (pollakiurie). L'impossibilité totale de vider la vessie est exceptionnelle dans la SEP, mais on constate assez souvent une vidange incomplète (rétention). Cette rétention s'observe chez près de la moitié des malades, particulièrement chez les hommes. Un résidu vésical augmente la fréquence des mictions et facilite les infections urinaires. Avant l'ère des antibiotiques, celles-ci se transmettaient parfois aux reins et pouvaient compromettre la vie des patients. Actuellement ces complications sont heureusement devenues rares, mais il n'en reste pas moins que les troubles urinaires constituent un problème particulièrement ennuyeux sur le plan social.

Exceptionnellement ils peuvent être les premiers signes de la maladie (5 à 10 % des cas) mais en général, ils ne surviennent qu'après une dizaine d'années d'évolution. Ils sont nettement plus fréquents chez les patients qui présentent des troubles moteurs ou sensitifs des deux membres inférieurs, ce qui traduit une atteinte de la moelle, et sont d'autant plus marqués que la paralysie est plus importante.

Sur le plan mécanique, les problèmes vésicaux résultent soit d'une contractilité excessive du muscle vésical (hyperréflexie), soit d'un manque de coordination (dyssynergie) entre l'anneau musculaire qui ferme la vessie en bas (sphincter) et les contractions vésicales. Pour évacuer l'urine, ce sphincter doit en effet se relâcher en même temps que la vessie se contracte. La perte totale de la contractilité vésicale (atonie) est exceptionnelle. La contenance normale d'une vessie est de 300 à 500 ml. Elle se remplit lentement et le premier besoin se fait sentir chez l'individu sain à partir de 250 ml environ, un besoin impérieux au-delà de 300 ml. Ces besoins d'uriner sont contrôlés volontairement mais ce contrôle est fréquemment déficient chez les patiens SEP qui doivent alors se présenter à la toilette de toute urgence (impériosité). Certaines techniques permettent d'étudier le fonctionnement de la vessie et de son sphincter et donc de connaître l'origine des troubles de la miction. Chez la plupart des malades il s'agit d'une hyperréflexie du muscle vésical qui se contracte déjà pour de faibles quantités d'urine. Il s'y associe souvent (50 % des cas) une dyssynergie du sphincter, entraînant une rétention.

Le traitement médical des problèmes urinaires consiste en l'administration de médicaments ayant une action inhibitrice sur le muscle vésical, diminuant ainsi l'impériosité et la pollakiurie. Il faut cependant savoir qu'ils peuvent être moins efficaces lorsqu'il existe un résidu. Pour éviter ce résidu, on prescrit des médicaments qui relâchent le sphincter et permettent une vidange plus complète. Ces médicaments ne sont malheureusement pas toujours efficaces et il faut alors recourir aux sondages intermittents que le patient peut apprendre à faire lui-même. Cette technique est de plus en plus courante actuellement. En cas d'échec des traitements médicaux, une sonde à demeure par la voie naturelle ou par voie transcutanée suprapubienne sont des mesures transitoires en attendant des interventions chirurgicales sur le sphincter ou même une dérivation des urines à la peau.

Troubles des fonctions intestinales

Alors que la moitié des patients SEP présentent des troubles des fonctions intestinales, peu d'entre eux s'en plaignent.

En fait les mécanismes qui les provoquent sont semblables à ceux entraînant les troubles vésicaux et sont caractérisés par des contractions spontanées et anormales du rectum ainsi qu'une faiblesse de contraction du sphincter anal. De plus le transit intestinal est fréquemment perturbé par des causes diverses, telles qu'une atteinte du système nerveux sympathique, les effets secondaires de certains médicaments, un apport en liquides insuffisant et une activité physique réduite. Malheureusement, si nous connaissons assez bien la pathophysiologie des troubles urinaires, nous savons peu de choses de celle des troubles intestinaux, ce qui nous limite fort dans leur traitement.

La première étape est une hygiène alimentaire stricte concernant les horaires des repas, la prise de liquides et de fibres végétales facilitant le transit. Le second pas est l'utilisation de médicaments facilitant la formation de selles et qui doivent être pris avec des liquides. Enfin, en cas d'échec, il faudra recourir aux agents laxatifs et aux suppositoires. Le besoin impérieux de se présenter à la toilette ou l'incontinence sont heureusement rares. Ils peuvent être corrigés par des substances ou des médicaments favorisant la constipation.

Troubles sexuels

Les problèmes sexuels dans la SEP n'ont été étudiés que récemment. Ce genre de sujet est longtemps resté un tabou social et n'a été abordé ouvertement que depuis peu, aussi bien par les patients que par le monde médical. On croyait autrefois que l'hypersexualité était le trouble le plus fréquent, ce qui n'a pas été confirmé. Dans une enquête récente, seulement 23 % des hommes et 40 % des femmes atteintes de SEP ont déclaré ne pas avoir de problèmes dans ce domaine. L'activité sexuelle était diminuée chez 23 % des hommes et 15 % des femmes et totalement abolie chez 54 % des hommes et 45 % des femmes. Les problèmes sont donc plus fréquents qu'on ne le pensait autrefois par manque d'information.

Habituellement il existe un délai de plusieurs années entre le début de la maladie et l'apparition des troubles, mais 15 % des patients ont déjà des problèmes sexuels au moment du diagnostic. La physiologie de l'activité sexuelle est mieux connue chez l'homme. Dans les deux sexes, elle est sous la dépendance du système nerveux végétatif mais elle est également influencée par des facteurs psychologiques. Soixante-cinq pourcent des hommes se plaignent de troubles sexuels et deux tiers signalent une érection trop faible ; un tiers accuse une diminution de la libido expliquée parfois par un manque d'intérêt ou de la fatigue. Cinquante pourcent des femmes au moins ont des problèmes sexuels caractérisés par des modifications de sensation dans les cuisses et la région génitale. Les plaintes les plus gênantes sont des modifications de sensibilité à caractère douloureux. Un tiers n'arrive plus à l'orgasme et se plaignent, comme les hommes, de manque de libido et de perte d'intérêt dans le domaine sexuel. Les rapports douloureux (dyspareunie) sont rarement signalés.

Quel que soit le sexe, divers troubles neurologiques peuvent poser un problème pratique, tels que la raideur musculaire, les crampes, les douleurs, l'incontinence, la présence d'une sonde urinaire, etc... Ils agissent également sur le plan psychologique car à cause d'eux les malades peuvent se considérer comme peu séduisants ou même repoussants. Enfin il ne faut pas oublier que les malades atteints de SEP sont en général de gros consommateurs de médicaments et que certains d'entre eux, notamment les antispastiques et les antidépresseurs, peuvent diminuer l'activité sexuelle.

Pratiquement la moitié des malades disent qu'ils ont perdu un intérêt pour la vie sexuelle partiellement ou totalement, et que la fréquence des rapports a diminué de façon évidente peu après le début de la maladie. Les personnes jeunes sont les plus affectées, par contre les patients très handicapés ne semblent plus y accorder autant d'importance. La physiologie de l'activité sexuelle étant mieux connue chez l'homme, il est utile d'essayer de faire la part entre l'impuissance résultant d'une interruption des voies nerveuses et celle causée par des facteurs psychologiques. Des examens neurophysiologiques, radiologiques ainsi que des mesures de la circulation sanguine au niveau du pénis ont montré que dans la grande majorité des cas, l'origine des problèmes était organique et non psychologique. Pour y remédier, on a proposé des injections locales de papavérine (un vasodilatateur) ou la mise en place d'une prothèse. En général les patients sont soulagés d'apprendre que leurs troubles sexuels sont directement imputables à leur maladie.
Il existe dans certains pays des centres spécialisés et il est conseillé dans ce cas que les deux partenaires consultent ensemble, de façon que la guidance psychologique et les suggestions d'ordre pratique soient envisagées de commun accord.

Troubles psychiatriques

On observe souvent chez les patients atteints de SEP des changements d'humeur passagers, de l'instabilité et de l'angoisse. Deux tiers des malades éprouvent l'un ou l'autre symptôme dans le courant d'une année et dans un tiers des cas ces troubles sont suffisamment graves pour être considérés comme une dépression sévère. Près de la moitié des malades passent par une période dépressive dans leur vie et les alternances d'excitation et de dépression (psychose maniaco-dépressive) ne sont pas exceptionnelles. Ces épisodes d'agitation maniaque peuvent notamment s'observer lors d'administration de cortisone. Les troubles de l'affectivité sont fréquents pendant les poussées et chez les patients présentant une forme progressive.

Ces troubles ne sont cependant pas en rapport avec la gravité du handicap. Les patients atteints de SEP semblent plus vulnérables aux affections psychiatriques que des personnes saines ou même que des patients handicapés par d'autres maladies. Par contre, avant que les patients ne développent la SEP, la fréquence des troubles psychiques est la même que dans une population normale. Il semble donc que les plaques cérébrales jouent un rôle dans l'apparition de ces troubles. Curieusement il n'y a cependant pas de corrélation entre la gravité des troubles psychiques et le nombre de lésions observées à l'IRM ou leur localisation.

Par contre, le stress semble un facteur déterminant dans l'apparition des troubles psychiatriques. Les lésions cérébrales semblent donc fragiliser les malades et les rendre plus vulnérables aux facteurs extérieurs déclenchant des troubles psychiques. On considérait autrefois que l'euphorie et l'indifférence étaient caractéristiques de la SEP. En réalité, elles ne s'observent que chez 10 % des patients. Ces troubles de l'humeur sont davantage en rapport avec des changements de personnalité qu'avec un problème affectif. Contrairement aux autres troubles psychiques, il existe une corrélation entre le nombre de lésions à l'IRM et l'euphorie ou l'indifférence. Ces lésions sont situées plus particulièrement dans les parties centrales et postérieures du cerveau, ainsi que dans les régions périventriculaires. Ces troubles peuvent parfois aller jusqu'au manque de contrôle total des émotions avec alternance de rires et de pleurs. On pense qu'elles résultent d'une interruption des connexions entre les lobes frontaux, qui contrôlent notre émotivité, et le reste du cerveau.

Des psychoses transitoires (états paranoïaques en particulier) ont été décrites. Elles s'expriment cliniquement de la même façon que chez d'autres malades psychiatriques. Elles surviennent cependant à un âge plus tardif. Elles paraissent en rapport avec des lésions mises en évidence à l'IRM et situées au niveau des cornes temporales.

Comme nous l'avons déjà dit, il est exceptionnel que des troubles psychiatriques soient les premiers signes d'une SEP.

Troubles des fonctions intellectuelles

L'idée que les malades SEP n'ont guère de troubles intellectuels, autrement dit des fonctions cognitives, est actuellement battue en brèche. On admet aujourd'hui que 50 à 60 % des patients en sont atteints, aussi bien ceux qui présentent des formes à poussées pures que ceux évoluant de façon progressive.

La mémoire et les capacités d'abstraction sont le plus souvent atteintes alors que le langage est épargné. Le tableau clinique est différent de celui observé dans la démence présénile (maladie d'Alzheimer) où l'on trouve une altération de l'apprentissage, de la mémoire globale et de l'expression verbale, tandis que dans la SEP il s'agit de troubles de l'attention, de la mémoire de fixation et des fonctions psychomotrices. En fait, la localisation des lésions est très différente, puisque l'Alzheimer touche les cellules du cortex cérébral tandis que la SEP atteint la substance blanche. On parle donc de démence corticale dans l'une et sous-corticale dans l'autre. Les troubles cognitifs observés dans la SEP ressemblent davantage à ceux que présentent les personnes atteintes de la maladie de Huntington, caractérisée également par des lésions de la substance blanche.

Même si l'atteinte des fonctions intellectuelles est souvent discrète dans la SEP, il n'en demeure pas moins qu'elle constitue un problème fréquent dans le travail, les contacts sociaux et les activités journalières. L'évolution de ces troubles intellectuels est étroitement liée à la progression de la maladie dont ils ne semblent jamais constituer le premier signe. L'atteinte de la mémoire et de l'attention s'observe surtout chez les malades qui sont entrés en phase progressive. Ils semblent moins fréquents dans les formes qui récupèrent à chaque fois après leurs poussées. La mémoire immédiate, c'est-à-dire la faculté de mémoriser sur le champ, n'est généralement pas atteinte dans ces formes, sauf si le patient est en poussée. Par contre la mémoire des faits récents (quelques semaines ou mois) est
fréquemment altérée. On possède peu de données concernant la mémoire des faits anciens (années) mais elle semble en général conservée. Il existe une corrélation entre la localisation des lésions cérébrales et les troubles de mémoire de faits récents. Les lésions situées dans la substance blanche entraînent une baisse de l'attention, une difficulté pour encoder les choses à mémoriser et un manque de motivation. Par contre la conservation des informations  ainsi que l'expression verbale, situées dans les régions corticales, sont moins atteintes par la maladie.

Les déficits cognitifs observés chez les patients SEP s'expriment de façons très variées. Chez les malades présentant une forme lentement progressive, le déficit fondamental, qui se manifeste dès le début, est une diminution de la vitesse et de la capacité de traiter l'information au niveau cérébral. Quoique la mémoire immédiate puisse être conservée à ce stade, les tâches qui impliquent des processus plus complexes peuvent déjà être difficilement exécutées. Au cours de l'évolution de la maladie, le cortex des lobes frontaux est progressivement isolé, coupé de ses connexions avec d'autres centres, par les zones de démyélinisation. Le patient perd alors la capacité de contrôler ses mécanismes de stockage et d'utilisation des informations. On sait en effet que les atteintes des lobes frontaux, de quelque origine qu'elles soient, entraînent une perte de l'inhibition, du contrôle du comportement. En pratique, les patients se plaignent d'oublier ce qu'ils projetaient de faire, de pouvoir difficilement faire deux choses à la fois, et de perdre l'automatisme que nous avons tous acquis pour certaines choses fondamentales de la vie courante. Faire quelque chose leur demande un effort de concentration plus important. 

Les troubles affectifs et intellectuels sont donc plus fréquents dans la SEP qu'on ne le croyait autrefois. Ils ont été longtemps négligés, peut-être parce qu'on ne souhaitait pas ajouter un handicap psychologique ou intellectuel à un handicap physique déjà difficile à supporter. Cette vision des choses est heureusement en train de changer. Il ne faut pas oublier qu'ils constituent en effet une gêne supplémentaire et qu'ils répondent aux traitements aussi bien chez les malades SEP que chez d'autres patients. Ceci concerne notamment les troubles de l'humeur et les troubles de l'attention. Il faut cependant savoir que, comme la réhabilitation des fonctions motrices, la rééducation neuropsychologique dans la SEP doit être différente de celle utilisée chez des patients souffrant de lésions cérébrales traumatiques ou vasculaires. Il est important avant tout de préciser quel est le déficit responsable du trouble cognitif et de centrer ensuite la rééducation sur ce déficit.

Enfin il est important de signaler que la corrélation entre les troubles de l'humeur ou des fonctions cognitives et l'IRM est plus évidente que pour le handicap physique. Des études récentes avec l'interféron montrent que ces troubles sont améliorés précocement par le traitement. C'est pourquoi les tests des fonctions cognitives et de l'affectivité sont de plus en plus souvent inclus dans les protocoles d'essais thérapeutiques.

Troubles du système nerveux périphérique (SNP)

Il est classique de dire que la SEP est strictement limitée au système nerveux central (SNC). Cependant, des contrôles anatomiques et des examens neurophysiologiques montrent parfois des anomalies au niveau des nerfs périphériques chez les malades SEP, notamment une réduction de l'épaisseur de la myéline et un ralentissement de la vitesse de conduction.

Les cellules responsables de la fabrication de la myéline ne sont pas les mêmes dans le SNC (oligodendrocytes) et dans le système nerveux périphérique (SNP) (cellules de Schwann). Au microscope, il n'y a pas de différence de structure, la myéline se présentant dans les deux cas comme une membrane spiralée et très serrée. De même, sur le plan électrophysiologique, elles se caractérisent toutes deux par une grande résistance et une faible capacitance (isolant). La seule différence est d'ordre biochimique, les principales protéines qui les constituent n'étant pas les mêmes. Toutefois cette divergence n'est pas absolue car quelques protéines sont communes. On peut donc imaginer que dans certains cas de SEP, une de ces protéines communes soit antigénique et provoque des lésions de la
myéline aussi bien centrale que périphérique. Il est intéressant de rappeler qu'il existe également une affection immunitaire du SNP (maladie de Guillain et Barré) et que, chez certains de ces patients, l'IRM permet de mettre en évidence une atteinte de la myéline centrale.

Quoiqu'il en soit, les études neurophysiologiques montrent que dans la SEP, le SNP, lorsqu'il est concerné par l'agression immunitaire, ne présente pas de destruction majeure et que son fonctionnement n'en est que très modérément perturbé. On peut donc considérer qu'en pratique la SEP ne concerne que le SNC .

Troubles du système nerveux sympathique

En principe la SEP n'atteint pas le système nerveux sympathique. Toutefois la régulation de ce dernier est en partie sous le contrôle de centres situés dans le cerveau et la moelle épinière. Il est donc possible que la présence de plaques à leur niveau puisse provoquer secondairement des troubles sympathiques. De fait certaines études montrent que les réactions du coeur ou de la pression sanguine à divers stimuli sont anormales chez près de la moitié des malades SEP. Toutefois ces anomalies se traduisent exceptionnellement par des troubles cliniques. Il n'existe pas de relation entre ces troubles et la durée de la maladie, sa forme ou sa gravité.

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