La plupart des maladies auto-immunes ont une prépondérance féminine parfois très marquée. C’est aussi le cas dans la SEP où actuellement on diagnostique la maladie chez 3 femmes pour 1 homme (75 % – 25 %). Ce ratio a longtemps été de 2 femmes pour 1 homme. Cette augmentation de la prépondérance féminine a été observée progressivement durant ces 30 dernières années, et la prévalence de la maladie (nombre de personnes affectées/100.000 habitants) a elle aussi augmenté durant cette même période, mais de manière encore inexpliquée, uniquement chez la femme. Les causes possibles en sont une augmentation du tabagisme féminin (le tabagisme étant un facteur de susceptibilité à développer la SEP) et des grossesses plus tardives. Quoi qu’il en soit, le rôle des hormones sexuelles dans cette prépondérance féminine des maladies auto-immunes est fortement soupçonné mais encore mal expliqué.
La SEP commence généralement entre 25 et 35 ans avec un pic à l’âge de 29 ans. Il existe cependant des formes juvéniles débutant avant 18 ans, avec la même prépondérance féminine. Plus les premières règles sont précoces, plus la maladie commence tôt chez le sujet prédisposé. Durant la grossesse, la fréquence des poussées diminue progressivement et devient trois fois plus faible durant le troisième trimestre. Il existe par contre un rebond des poussées lors du premier trimestre post-accouchement.
Il y a quelques décennies, une grossesse était déconseillée aux femmes souffrant de SEP. Ce n’est plus du tout le cas actuellement. Grâce à nos traitements actuels, on peut en effet diminuer significativement la fréquence des poussées avant, pendant et après la grossesse. Certains de ces médicaments peuvent être poursuivis durant toute la grossesse, d’autres durant les 2 premiers trimestres. Certains sont par contre déconseillés et doivent être arrêtés soit au moment d’un test de grossesse positif, soit plusieurs semaine avant le début d’une grossesse. Il est donc important lors du choix d’une médication, de prendre en compte les souhaits des patientes concernant leur projet de procréation. Par ailleurs, les techniques actuelles de fécondation in vitro n’augmentent pas le risque de poussées de la maladie. La contraception hormonale n’a aucun effet ni sur l’apparition de la maladie, ni sur son évolution.
Dans une étude américaine analysant la proportion de femmes enceintes avec ou sans SEP entre 2006 et 2015, il est très réconfortant de voir que cette proportion augmentait de 7,91 % à 9,47 % chez les femmes SEP alors qu’elle diminuait de 8, 83 % à 7,75 % chez les femmes indemnes de cette maladie. Les 2 courbes se croisaient en 2008. Dans leur volonté de mener une vie normale et avec une résilience remarquable, les femmes SEP menaient plus souvent une grossesse à terme que la population féminine contrôle.
Le fait d’avoir eu un ou plusieurs enfants avant le début d’une SEP est un facteur de meilleur pronostic de la maladie sur le long terme. Donner naissance à un ou plusieurs enfants alors que l’on souffre de SEP n’a pas de conséquences négatives sur l’évolution de la maladie, et au contraire pourrait avoir un effet positif sur celle-ci. Il s’agit d’études assez difficiles à interpréter puisque on peut penser que seules des femmes peu ou pas handicapées débuteront une grossesse. Cependant toutes les données actuelles sont en faveur d’une absence d’aggravation de la maladie par des grossesses ayant lieu soit avant le début soit après le début de la maladie. Il est vraisemblable que les modifications des taux d’hormones sexuelles et de leurs récepteurs induites par la grossesse jouent un rôle favorable sur le dérèglement immunitaire causal de la SEP, ponctuellement et éventuellement aussi, sur le long terme.
Prof. Em. Christian Sindic
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