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Etude ASIIMS

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Association of interferon-beta and inosine in relapsing-remitting multiple sclerosis

Si l'hypothèse de départ n'a pas été confirmée, les travaux permettent néanmoins d'avancer dans les recherches sur le rôle protecteur de l'acide urique dans la SEP. Explications.

Etude ASIIMS - Recherche clinique - Fondation CharcotDepuis fin décembre 2007, l'étude ASIIMS (Association of Interferon beta and Inosine in relapsing-remitting Multiple Sclerosis) est terminée et l'évaluation statistique des résultats est en cours. Il s'agit d'une étude clinique phase II conduite dans 13 services belges de neurologie (*), chez 157 patients ayant une forme à poussées et rémissions, répartis au hasard en deux groupes : 79 patients ont reçu de l'interféron bêta (IFNβ) et de l'inosine, et 78 patients de l'IFNβ et un placebo

Lutter contre la neurodégénérescence

Cette étude exploite le constat selon lequel la perte des cellules nerveuses (neurones) et de leurs prolongements (axones) survient très tôt après le début de la maladie. Cette perte est la conséquence de deux mécanismes pathologiques différents. D'une part les cellules inflammatoires détruisent par elles-mêmes les structures nerveuses par la sécrétion des substances toxiques. D'autre part des molécules contenant de l'oxygène actif (toxicité oxidative) et une concentration trop élevée de glutamate (**) provoquent la mort des neurones et des axones (excitotoxicité). Etroitement interactives, ces deux toxicités sont à la base des maladies neurodégénératives comme la sclérose latérale amyotrophique ou les maladies de Parkinson et d'Alzheimer.

Acide urique : un bon anti-oxydant

Nous disposons de plusieurs médicaments capables de lutter contre l'inflammation, notamment les IFNβ et les immunosuppresseurs. Par contre nous sommes très démunis contre la toxicité oxydative et l'excitotoxicité. Des études chez l'animal et des observations cliniques ont montré que l'acide urique, un de nos anti-oxydants naturels les plus puissants, est efficace contre ces deux formes de toxicité. Sur le plan expérimental l'acide urique est très efficace dans l'EAE. Sur le plan clinique, les taux d'acide urique sont plus bas que la normale chez des patients SEP, en particulier lors des poussées. Une étude épidémiologique a montré que les personnes qui ont une hyperuricémie chronique (goutte) sont moins souvent atteintes de SEP. Il a donc été suggéré de provoquer une hyperuricémie chez des patients SEP en leur donnant un précurseur de l'acide urique (inosine) par voie orale. Trois études chez un petit nombre de patients ont montré qu'un taux d'acide urique élevé maintenu pendant deux ans semblait ralentir la progression du handicap. A noter que ces patients n'avaient pas reçu d'autres traitements.

But de l'étude

La rationalité de l'étude ASIIMS était donc que l'administration d'IFNβ   associée à de l'inosine  serait plus efficace que l'administration d'IFNβ seul.

L'analyse statistique de cette étude montre que les deux groupes étaient parfaitement homogènes sur le plan de l'âge, de la durée de la maladie, du handicap mesuré par l'échelle EDSS, de la fréquence des poussées et de la répartition des sexes. Notons cependant  que le pourcentage de femmes inclues dans l'étude est particulièrement important (80%). Les critères de cette première évaluation étaient : le pourcentage de patients ayant progressé de un point ou plus sur l'échelle EDSS, le temps écoulé avant d'atteindre un handicap définitif et l'évolution de l'EDSS moyen dans chaque groupe.

Résultats

L'administration d'inosine associée à l'IFNβ a été bien tolérée. Les effets secondaires ont été aussi nombreux dans le groupe placebo que dans le groupe inosine. Une particulière attention a été accordée à la fréquence des lithiases urinaires : trois cas dans le groupe inosine et un dans le groupe placebo, tous sans séquelles. Aucune augmentation de la tension artérielle n'a été observée après administration d'inosine. Sur le plan de l'efficacité, aucune différence n'a pu être détectée entre les deux groupes concernant les trois principaux critères d'évaluation. On doit donc conclure que l'addition d'inosine à l'IFNβ n'apporte aucun bénéfice supplémentaire.

Une étude qui confirme une hypothèse est évidemment plus gratifiante, tant pour les patients que pour les chercheurs. Mais une étude dont les résultats sont négatifs n'est ni un échec ni une perte de temps ou d'argent.

Dans le cas particulier de l'inosine, de nombreuses observations expérimentales et cliniques montrent que l'acide urique joue certainement un rôle protecteur dans la SEP. Diverses études ont montré que le taux d'acide urique augmentait chez les patients traités par IFNβ ou glatiramer acetate. On peut donc s'interroger sur les causes pouvant expliquer le résultat négatif de l'étude ASIIMS. Une première explication serait que l'effet bénéfique de l'inosine a été masqué par celui de l'IFNβ pour diverses raisons : dose d'inosine  trop faible et hyperuricémie trop basse, patients chez qui la progression était trop lente, suivi des malades trop court.

Conclusions provisoires

Le fait que la combinaison d'inosine et  d'IFNβ n'apporte pas de bénéfice supplémentaire par rapport à l'IFNβ seul n'exclut pas qu'elle puisse avoir un effet bénéfique sur la progression du handicap chez des patients SEP qui n'ont jamais été traités ou dans d'autres affections dégénératives. Diverses observations suggèrent en effet que l'acide urique intervient également dans la maladie de Parkinson. Une étude clinique est actuellement en préparation aux Etats-Unis pour voir si une hyperuricémie induite par l'inosine peut ralentir l'évolution de cette maladie. Les informations apportées par l'ASIIMS concernant la façon la plus sûre d'administrer l'inosine et sa tolérance à long terme seront donc très utiles pour nos collègues américains.  

(*) AZ Middelheim, AZ Sint Jan, AZ VUB, Cliniques Universitaires St Luc, CHU Charleroi,
LUC Biomedisch Onderzoekinstituut, UZ Antwerpen, Centre neurologique Fraiture, Hopital de la Citadelle, Nationaal MS Centrum, Clinique St Pierre Ottignies, Elisabeth Ziekenhuis et Centre Hospitalier de Luxembourg.

(**) un neurotransmetteur impliqué dans pratiquement toutes les fonctions du cerveau